La Constitution, miroir de la société de classe. (1)

Dans cet article, quasiment exhaustif, Roustem Vakhitov revient sur les dernières péripéties de la Constitution, suite aux propositions à la hussarde du chef de l'état le 15 janvier dernier.
Publié il y a quelques jours dans Sovietskaya Rossya, ce nouvel article témoigne une fois de plus de la colère profonde inextinguible d'une (large) partie de la population : le sentiment d'avoir été floué, volé, piétiné.
Constatant cette colère infinie, je repense à la remarque de Tatiana à Oneguine, chez Pouchkine. Ce dernier vient lui déclarer sa flamme...Trop tard! "Et le bonheur était si proche, possible"... Mais trop tard. " Je me suis donnée à un autre, je lui serai fidèle toute ma vie ".
J'en traduis de larges extraits.
Dans une première partie, il remonte à la Constitution américaine, 2 siècles et seulement 27 modifications.
Ensuite il s'attarde surtout à démontrer que V.Poutine est, lui aussi , l'homme d'une classe et contrairement à la fable diffusée, celle du président patriote plus juste que le président voleur libéral, B.Eltsine, il défend toujours âprement les intérêts de sa classe.
Dans un premier temps, retour sur 1993. Puis plongée minutieuse dans la présidence Poutine.
TRADUCTION :
En 1991 un coup d'état a eu lieu en URSS et nos propagandistes officiels préfèrent n'en pas parler.
Le 8 décembre 1991, 3 dirigeants des 3 plus importantes républiques de l'URSS, Russie, Ukraine, Biélorussie ont signé un accord qui dénonçait ni plus ni moins le traité d'union de 1922, dissolvant l'URSS et accordant l'indépendance aux républiques soviétiques, 15. Ce traité était parfaitement illégal car une telle décision ne pouvait être prise que par le Congrès des députés de l'Union ou au moins le Soviet Suprême qui ne fut pas non plus convoqué.
Du 8 décembre jusqu'au 25, date de la démission de M.Gorbatchev, l'URSS a continué d'exister M.Gorbatchev détenait le pouvoir sur les forces armées et le KGB. Donc d'un point de vue juridique le traité était une acte inconstitutionnel privant par ce coup d'état la direction de l'URSS de son pouvoir. On peut imaginer que tout dirigeant un peu volontaire aurait fait appel aux peuples de l'URSS, aux partis et mouvements politiques, à la communauté internationale (qui, notons le, ne savait pas trop comment réagir au pari d'Eltsine, craignant un scénario à la yougoslave, Américains compris.)
Gorbatchev n'en fit rien, et apeuré, dit humblement au revoir au peuple, abandonnant le pouvoir à son ennemi éhonté. (voir la vidéo, 11 minutes)
Dans les débuts de cette nouvelle période, la Constitution de 1978 a continué de fonctionner. Eltsine et sa camarilla n'y ont apporté que des modifications cosmétiques une loi sur le changement de nom de la RSFSR, République Soviétique de la Fédération Socialiste de Russie devenue Fédération de Russie fut même promulguée.
Même lors de la promulgation des réformes de choc de Gaïdar, le pays était à la croisée des chemins tout pouvait être encore rétabli en s'appuyant sur le potentiel de la Constitution Soviétique. En effet, aussi paradoxal que cela paraisse, nous avions encore une constitution qui proclamait la propriété par l'Etat des moyens de production, le système des fermes collectives et les droits sociaux des citoyens alors que Elstsine détruisait ces fermes et Gaïdar engageait les privatisations.
En 1992 Eltsine a tenté de faire passer à travers le Congrès des députés toute mention de la constitution soviétique. Mais il s'est heurté au refus du Congrès. Jusqu'en décembre 1993, notre Constitution faisait référence à l'URSS.
Le régime d'Eltsine effectuait ses réformes capitalistes, soit par décret présidentiel, soit par décisions gouvernementales. Et tous ces oukazes étaient inconstitutionnels.
D'ailleurs en 1990, Eltsine fut élu président par une des républiques de l'Union et non d'une Russie indépendante
La Constitution de 1993 est née après les événements tragiques de l'automne où opposants et partisans des réformes capitalistes se sont affrontés. La clique Eltsine a organisé un massacre sans précédent dans le centre de la capitale de notre pays, l'armée et les tanks ont tiré sur le Parlement, tandis que « l'occident civilisé » se taisait, ne cessant de qualifier le fossoyeur du parlementarisme russe... de démocrate. (Sur cet épisode décisif, voir mon article du 7 octobre 2018 J.B)
Et, par la trahison des responsables intermédiaires, Eltsine et son équipe ont pu refaire un coup d'état inconstitutionnel et imposer leur Constitution. Il n'y était plus du tout fait mention de « l'état national », ni de l'URSS, ni du système agricole collectif, ni du droit des citoyens au travail, au repos, au logement... contrairement à ce que déclarait celle de 1978.
Par contre étaient apparus des articles sur la garantie par l'Etat du droit à la propriété privé ( art.35..), la terre et autres ressources naturelles pouvaient passera à la propriété privée. ( art. 9 paragraphe 2)et l'Etat protégeait la liberté du marché. ( art.8-1). En d'autres termes la nouvelle Constitution incarnait et fondait juridiquement la victoire de la néo-bourgeoisie russe et son désir de s'emparer des richesses naturelles et se faire une belle rente sur leur vente à l'étranger.
L'opposition de gauche patriotique a aussitôt qualifié cette constitution d'anti-populaire. Et ce n'était pas une figure de style. Consultés, les citoyens qui se sont déplacés ont approuvé cette Constitution à 54,8%, tandis que 41,6 la refusaient. Résultat dans des conditions d'une propagande débridée et l'organisation de la consultation à la limite de la légalité,,,,
« Nous avions absolument besoin d'une nouvelle constitution, peu importe comment nous l'obtenions » devait déclarer un dirigeant.
Or, elle était rejetée par près d'un électeur sur deux et elle instaurait un régime présidentiel. En conformité à cette Constitution le président peut bloquer toute décision du Parlement, renvoyer le gouvernement... Il contrôle aussi les juges : tout cela fut fait consciemment. Cette néo-bourgeoisie craignait le peuple dont les yeux se dessillaient et commençait à refuser d'être pillé et rabaissé sous prétexte de l'affirmation de valeurs libérales. ( lisant et traduisant ce texte, je n'ai pas pu ne pas penser à la constitution de la Ve République en France et ce qui se passe aujourd'hui dans notre pays...J.B)
La popularité de B.Eltsine baissait au rythme du passage de la propriété nationale aux mains des oligarques proches du président, tandis que de concert l'état de la population se dégradait.
à suivre.
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Perte de confiance pour Vladimir Poutine
Au total, 35 % des Russes nomment Vladimir Poutine parmi les cinq ou six personnalités politiques du pays en qui ils ont le plus confiance, contre 39 % en
https://www.lecourrierderussie.com/fil/perte-de-confiance-pour-vladimir-poutine/
Sondage du 12 février.
25décembre 1991. Mikhail Gorbatchev quitte le pouvoir, déclaration officielle.